Il n'y en aura pas pour tout le monde


L'avenir
est une frite
qu'on se partage

Je suis ton maître


Chaque matin
dès qu'il a englouti
ses 20 grammes
de croquettes
libéré sa pisse
et affuté ses lames
alors même que 
le jour sifflotant
est un aimant
venu corrompre
ses sens
le chat revient
au bout du lit
s'endormir à mes pieds
Chaque matin
coûte que coûte
le chat rejoint
le côté obscur
de la flemme

Le mur

© photo : Raymond Depardon

La solitude s'érige
perte après perte
et le silence
sert de ciment

Tous les coups sont permis


La triste mine
qu'il affichait
depuis quelques jours
nous a menti
Ce que l'on croyait être
 le résultat
d'un mauvais coup
derrière la tête
était en fait
la conséquence
d'un bon coup
au moral

Junkies


Nos petits cœurs
engraissés à l'amour
et au sang
nourris logés blanchis
en échange d'un peu
d'adrénaline

Mumuse


Juste un petit effort
jouons avec le feu
il en brûle d'envie

Fais comme chez toi


Imagine
un paysage magnifique
Allez je te laisse
te balader

En un clin d'œil


Et subitement
dans l’œil figé
du rapace
l'immensité
devient proie

En croisière


Que notre espoir devienne
la charpente robuste
d'un rêve
n'y changera rien
Nous continuerons
à nous faire mener
en bateau
Nous nous contenterons
d'attendre de voir
sauter des dauphins

Spectateur du quotidien


Le ciel effleure les cimes
l'ennui épouse le sol
Ce matin tout a l'air
de coller

Stock de conserves


Il existe un sourire
pour chaque gueule d'enterrement
mais pour elle c'est différent
On a du passer commande
On attend la prochaine livraison
de rires en boîte

Sauvetage


Ils ont sauté
sur l'occasion
pour se tomber
dans les bras
et la fin de journée
était sauvée

Ça tourne


Elle pourrait commencer ici, par exemple, ce serait une longue et belle phrase, une phrase ponctuée de mots qui feraient du bien, je ne sais pas encore lesquels ni comment, des mots qu'on suivrait des yeux en souriant, le travelling d'un beau poème.

Les pieds dans les p'tits plats



Pourtant je commence
bien par mettre
les petits plats
dans les grands
mais arrive toujours
ce moment
où je finis par mettre
les pieds dedans

Discours oculaire


Ils se regardent
quelques mots suspendus
à leurs lèvres
Quelques petits mots
qu'ils n'en finissent pas
de lâcher
et qu'au bout d'un moment
ils ravalent
Aujourd'hui les yeux
font des phrases
plus longues

Tagada tagada


Ton cœur est
une pampa
où un cheval boiteux
galope en attendant
son heure

Vise un peu ça

© photo : Bill Brandt

L'endroit est agréable
blotti dans les ombres
hanté par un ou deux 
beaux rêves troués
et un rayon de soleil
vient de poser son cul
sur un brin d'herbe
pour regarder passer
cette jolie rivière

Mauvaise chute


Quelques mots sur
ce souvenir
de grande envergure
qui a fini les os brisés
le souffle court
après être tombé dans
un trou de mémoire

Par la petite porte


Fenêtre ouverte
bouchée bée
Le moucheron choisit
ma bouche

Un bon alibi


Un mauvais rêve
les tripes à l'air
aux pieds de la nuit
et la lueur du jour
pour alibi

Grand pont

© photo : Thomas Hawk

Elle ne compte plus
les rides
qui séparent ses râles
d'un gazouillis d'enfant

La trêve


Aujourd'hui il n'y aura
aucun acte héroïque
Aujourd'hui ce sera
repassage des capes
et pliage des collants
Aujourd'hui il n'y aura
aucun poing à lever
ni aucune explosion
La bravoure d'un canapé
suffira a
sauver mon cul

Panorama


Bâtir
souvenir après souvenir
empiler
bons et mauvais sourires
colmater
finalement grimper
tout en haut
Tout voir

Glouton


L'ombre d'un piaf
sur l'ombre d'une branche
nuage glouton

Du balai


Il est entré dans sa vie
sans s'essuyer les pieds
elle a très vite
fait le ménage

Pile ou face


Et soudain
le ventre rond du rêve éclate
supplanté par
quelques pépiements d'oiseaux
ou un marteau-piqueur