© photo : Willy Ronis
Il liquide un litre d'eau sur le pare-brise et monte dans son tacot. La nuit a fait de sa vieille tire recouverte de glace un carrosse pour ouvrier en retard. Il peine à démarrer et doit s'y reprendre à plusieurs fois avant de faire cracher ses tripes à l'engin. Il perd 10 minutes à attendre que le moteur se réveille, s'étire, et se remette d'une toux incurable-pas-la-peine-d'acheter-du-sirop. Il sait qu'il n'arrivera pas à l'heure, et pour le confirmer prend le temps de récolter un à un chaque feu rouge du boulevard. Le soleil a encore fait plus vite que lui. D'ici il voit bien que ses rayons sont déjà à trimer sur le quai. Quand il arrivera, comme chaque matin, il lui sourira, puis l'invitera à grimper sur ses épaules. Il ne peut plus blairer un seul de ses collègues, fait tout pour les éviter, devient fantôme des allées de palettes, mais le soleil est le dernier gus qu'il accepte encore volontiers de se mettre à dos.
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