Comme les gens bien élevés


Ferme
ta bouche
quand
tu cries

L'air brassé dans son dos


Il s'est assis
sur le muret
avec sa sueur
comme couverture
sirote sa bière
par petites gorgées
regarde loin devant
et derrière lui
la nuit
avec ses arbres
fait de grands gestes

Tu es ici chez toi


Il y a de ces jours
où tu paierais cher
pour habiter
un endroit bouillant
comme le soleil
et puis finalement
c'est lui qui vient
poser ses valises
chez toi

Ça ne mène à rien


C'est un long silence
de plusieurs kilomètres
qui rampe entre
leurs bras ballants
Ils marchent côte à côte
sur son dos
têtes baissées
mains fermées
leurs pas calqués
sur l'absence
C'est un long silence
de plusieurs kilomètres
dont les écailles mouvantes
ont la couleur terne
d'une dispute
de fin d'après-midi

Ne viens pas dire que tu n'étais pas au courant


Je préfère
te prévenir
au cas où
tu n'en saurais 
rien
Nos vies
se consument 
à une vitesse folle et
rares sont celles
dont la mèche
est défectueuse

J'suis pas là


C'est une belle journée
qui t'appelle
et tu ne réponds pas
Elle miroite et
tu ne bouges pas
le petit doigt
Tu restes couché
rien à faire
elle pourra briller
tant qu'elle veut
en règle générale
tes rêves
s'en sortent mieux
quand tu demeures
bien parallèle
à l'horizon

Ça sent le roussi


Il se trame
quelque chose
La concierge pose
des questions
à son balai
et ses réponses
ont l'optimisme
de la poussière

La coupe est pleine de vide

© photo : Carlos & Jason Sanchez

Il manque
quelque chose
Le vide déborde
Les courants d'air
ont remplacé
ta paume
et un peu
de solitude
me coule
au creux des mains

Un mystère à couper au couteau


Le brouillard
cache quelque chose
un joli paysage
un ciel violacé
une ribambelle d'oiseaux
pattes dans la boue et
becs dans l'eau ou 
je ne sais quoi d'autre
J'espère simplement
qu'il ne me joue pas
un sale tour
ce matin j'ai envie
d'exister un peu
et je m'en voudrais
terriblement d'être
son secret

Plus loin


À Dominique Chaussois

Plus loin
c'est plus près que
trop loin

Le pourquoi du comment


une fois que
l'insomniaque
avait compté
et recompté
tous les moutons
au résultat
il lui fallait encore
soustraire
ses ennuis

Burp !


Une nuit sur deux
est un jour 
trop saoul
qui vomit
dans tes rêves

Pas trop court s'il vous plaît...


Il suffisait de sortir de 
chez cette coiffeuse
pour entrer
en dépression

Vestiges du vacarme

© photo : Harvey Wang

Ici le silence
est un éclat
de bruit
recouvert
par le vent

Je sais de quoi je parle *


Vise juste
(à côté)
file droit
(derrière)
coupe court
(seulement dessus)
fais vite
(ton paresseux)
rafle tout
(ce qu'il reste)

* Quelques conseils à tous ceux qui manquent de précision

L'évaluation du danger

© photo : Hans Rudolf Huthoff

Les soirs de pluie et
les après-midi d'orage
sont à peu près
aussi inoffensifs que 
des couteaux à beurre
mais il ne faut pas
sous-estimer
les matins
sans soleil

Du bon boulot


J'ai vu des tapes
dans le dos
faire le travail de
plusieurs sourires

On ne passe pas

© photo : Robert Galbraith

Sur le rebord
de la fenêtre
un insecte prisonnier
de la glace
le soleil
venu des plaines pour
le délivrer
et ce peuplier
en travers de sa route
qui se tord
de gauche à droite
fait des bras et
des jambes
essayant d'ajuster
son ombre pour
l'en empêcher

Bonne planque

(Retrouve le chat parmi les ordures...)

Aujourd'hui pourtant
ce n'est pas
l'envie qui manque
mais c'est comme si
elle se cachait
quelque part

Comme dit le proverbe...


C'était un matin
monochrome
d'une tristesse
tartinée de blanc
Toute la nuit
il avait neigé
comme vache
qui chie

Jeu de rôle

© photo : Harry Gruyaert

Plus loin dans la rue
sur le bord du trottoir
un flocon kamikaze
une bourrasque rachitique
et un oisillon aplati
jouent à l'hiver

Choisis ton camp


La nuit a mastiqué
les choses et les gens
avalé
digéré
Maintenant le jour arrive
les dents blanches
en sifflotant
une musique
d'oiseaux et de vent
et à l'heure qu'il est
encore impossible
de vous dire
si aujourd'hui je serai
le bout de viande coincé
ou le cure-dents

À tour de rôle


Mes Rêves et
mes emmerdements
font les 2/8
et je me demande
qui posera
le premier
ses congés

Là où je ne l'attendais pas


Le sommeil ne vient pas
alors je fixe
le plafond
Je ne le vois pas venir
alors je fixe
le radio réveil
Toujours rien en vue
alors je décide de
filer au salon
où je le trouve
finalement
sous la vieille
couverture déchirée