Poiscaille


Nous avons volé une barque amarrée puis descendu la rivière. De temps à autres des carpes se prenaient pour des dauphins et faisaient briller leurs écailles près de nous. Le plafond de branches dessinait des mosaïques sur l'eau, et forçait nos zygomatiques. J'avais l'impression que mon sourire faisait le tour de ma tête.
Nous avons débouché sur l'étang. Il y avait plusieurs pêcheurs vissés sur leurs barques qui fixaient leurs bouchons crasseux partir à la dérive. Parfois on entendait un juron, qu'un héron emportait au passage. Nous avons tendu nos lignes, vidé un litre de rouge, et parlé de la neige et du sale temps. De l'après-midi, nous n'avons rien pris. Pas un pauvre poiscaille à poser sur les flammes.
Nous avons filé à la poissonnerie acheter de quoi faire croire que nous étions redoutables. Tous les gens qui passaient nous prenaient pour des héros. Le vrai héros, c'était le poissonnier, son étal puant, et ses bottes imprégnées de l'odeur de notre défaite.

6 commentaires:

Aurélia Jarry a dit…

Heureusement, la pêche peut toujours être sauvée par le rouge !

La Méduse et le Renard a dit…

A la vôtre!

Aurélia Jarry a dit…

Non que j'ai quelque chose contre la pêche ! Je la connais très bien, mais le rouge !

La Méduse et le Renard a dit…

Vous devez donc raffoler des poissons rouges.

madame de K a dit…

C'est très dangereux un sourire qui fait le tour de la tête ! Le risque c'est que la crâne s'ouvre en deux comme un litchi pressé entre pouce et index et que le bon sens s'envole par la brèche.

La Méduse et le Renard a dit…

Mais paradoxalement, ce n'est pas un sourire forcé, donc on n'y peut rien! J'aime beaucoup l'image du litchi :)