Cul de l'hiver


© photo : Ferry + Oertel

C'est tout noir dans le cul de l'hiver. Y a des lèvres gercées qui s'accrochent aux barbelés du vent, y a des mains fripées qui se noient dans les températures négatives. C'est tout noir dans le cul de l'hiver. J'ai vu des corps fantomatiques sortir la tête de l'eau, des glaçons claustrophobes vissés sur le piédestal des lacs gelés. J'ai vu la crasse des terres figées se coller aux fers de chevaux dépressifs. Le froid est bien dur, bien dense, bien incrusté dans nos caboches tristes comme des boules à neige. C'est tout noir dans le cul de l'hiver, quand les fleurs ferment bien leurs clapets et les animaux sauvages sonnent le glas des lendemains neigeux. C'est tout noir dans le cul de l'hiver, quand, dans la candeur des minutes suspendues, il dépose enfin son étron brillant sur les plaines endormies.

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