Les yeux trop loin


C'est une fin d'après-midi banale, avec soleil en décomposition et ribambelle de nuages. Les restes de lumière s'agglutinent à leurs pieds et réchauffent le silence. De petites braises pour mutisme frigorifié. Ils regardent ce feu imaginaire et l'attisent du regard. Ils sont assis comme ils seraient debout à attendre un bus, ou quelque chose d'ennuyeux à attendre. Bientôt le feu s'amincit et les nuages soufflent un peu de noir. Ils sont restés là une heure sans que rien ne sorte de leurs bouches que de longues guirlandes de soupirs. Ils s'en font des colliers. Le genre de longs colliers très moches qu'on n'offre pas à quelqu'un qu'on aime encore. Alors ils repartent, chacun leur guirlande autour du coup et les yeux trop loin pour espérer relancer le feu une dernière fois.

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